LE PACTE CIVIL DE SOLIDARITE
(vérsion abrégée pour Français 10)
du site de l'Ambassade de France aux Etats-Unis - voir ci-dessous

par Frédéric MARTEL

Dans les années récentes, la reconnaissance des droits des couples non-mariés, parmi lesquels les homosexuels, est devenue une question publique dans la plupart des démocraties occidentales. En fonction de leur tradition historique, de leur culture, et bien sûr des lois existantes, chaque pays a choisi sa propre manière d'aborder le débat.

La France s'est ainsi récemment dotée d'une loi qui, en créant le Pacte civil de solidarité (PACS), permet d'offrir un statut à tous les couples non-mariés, hétérosexuels et homosexuels. Depuis sa création (la loi a été adoptée définitivement le 13 octobre 1999), 75 000 personnes ont signé un PACS.

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La situation juridique des homosexuels

Avant 1981, les discriminations juridiques à l'égard des individus homosexuels étaient encore inscrites dans le droit français. L'âge de la majorité sexuelle était fixée à 15 ans pour les hétérosexuels et à 18 ans pour les homosexuels ; les législations concernant les fonctionnaires (qui devaient "être de bonnes moeurs") et les locataires (qui devaient se conduire "en bons pères de famille") étaient implicitement antihomosexuelles ; différents contrôles de police, constitution de fichiers et interdictions de lieux et de films décuplaient encore, dans la pratique, le peu d'intérêt du législateur. Dès son élection à la présidence de la République, en 1981, François Mitterrand devait faire abroger la totalité de ces textes, établir une stricte égalité quant à l'âge de la majorité sexuelle (fixé à 15 ans pour tous à partir de la loi de 1982) et rendre la loi neutre du point de vue de la sexualité. Dès lors, l'individu homosexuel n'était plus discriminé en tant que tel (pas plus qu'il n'était d'ailleurs, comme le veut la tradition républicaine française, reconnu en tant que tel). L'égalité républicaine et le refus des différences étaient établis. Pour l'individu, mais pas pour les couples.

La loi et les couples non-mariés

Jusqu'au vote du PACS, les couples non-mariés, quel que soit le sexe des partenaires, ne bénéficiaient d'aucune reconnaissance légale en France. Si au cours des années 1970 et 1980, la jurisprudence avait peu à peu pris acte de l'existence des concubins hétérosexuels et reconnu certains de leurs droits (en matière de Sécurité sociale ou de logement par exemple), aucun statut général n'avait été défini. Surtout, les couples homosexuels étaient exclus de ces évolutions puisque, ne pouvant pas se marier, ils ne pouvaient pas non plus être considérés comme de véritables concubins (en vertu d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation, l'autorité judiciaire la plus haute en France). Au cours de l'épidémie de sida, cette inadaptation du droit, comme de la jurisprudence, avait été la source d'injustices graves : des malades du sida n'avaient pas pu bénéficier de la couverture sociale de leur compagnon, ni du transfert de bail ; certains homosexuels étaient rejetés par la famille de leur ami défunt, sans parler des limites au droit de visite à l'hôpital ou des exclusions éventuelles aux cérémonies de deuil.

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La définition du PACS

Le PACS est un "contrat conclu entre deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser la vie commune" précise l'article 1 er de la loi. Cette notion de "contrat", volontariste, a été préférée à celle de "constat", plus faible du point de vue de l'engagement des cocontractants. Parallèlement, le législateur a choisi de définir également, en plus du PACS, le concubinage, qui figure désormais explicitement dans le code civil comme "union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple " (article 3 de la loi).

Les principaux effets juridiques du PACS

Les personnes liées par un PACS s'apportent "une aide mutuelle et matérielle". Elles bénéficient d'une imposition commune (trois années après la signature du PACS) et d'un abattement de 76 000 euros [en 2007, soit $104 000] sur les droits de mutation (articles 4 et 5). Le partenaire non assuré social bénéficie, le cas échéant, de la couverture sociale de son partenaire (article 7), en revanche les prestations sociales et les minima sociaux seront calculés, comme pour les personnes mariées ou en concubinage, au taux "couple" et non plus "individuel" dès lors que les personnes sont "pacsées". Le PACS est pris en considération quant au logement et toute personne pacsée qui n'aurait pas cosigné le bail peut obtenir automatiquement le transfert de bail (article 14). Les dispositions du code du travail en matière de droit aux congés et d'autorisations exceptionnelles d'absence pour événements familiaux, sont étendues à la personne cosignataire du PACS (article 8). L'existence du PACS est prise en compte pour les mutations des fonctionnaires (article 13). Enfin, en ce qui concerne l'obtention d'un titre de séjour pour un partenaire étranger, la conclusion d'un PACS constitue "l'un des éléments d'appréciation des liens personnels en France" (article 12). Ces différents droits et devoirs, dont il faudrait détailler avec plus de précision l'étendue exacte et la portée, marquent à coup sûr une évolution significative du droit civil français. Ils comportent néanmoins des limites que les associations critiquent.

Les limites du PACS

Depuis qu'un cadre concret et tangible a été construit, plusieurs propositions ont été faites en vue de corriger les quelques dysfonctionnements juridiques du texte et, ce faisant, le pérenniser. La question des délais fixés pour l'imposition commune et du taux d'abattement différencié en matière de succession fait débat. La question du droit au séjour et de la naturalisation suscite également discussion. Enfin, une clarification du régime de l'indivision est demandée et on peut imaginer que le PACS ouvrira à terme aux personnes pacsées un véritable statut d'héritier - ce qu'il ne fait pas pour l'instant.

Le PACS et le droit de la famille

S'il offre donc des droits significatifs aux couples non-mariés et comporte certaines limites, le PACS ne change cependant rien au droit de la famille. Il est, de ce point de vue, un acte neutre. Il ne modifie ni les règles en matière de filiation et d'adoption, ni les règles concernant la procréation médicalement assistée ou l'autorité parentale. S'agissant de la filiation, le Pacs n'a aucun effet ; de même pour l'adoption qui est interdite à deux personnes pacsées comme elle est interdite à deux concubins (mais une procédure d'adoption existe pour une personne célibataire).

Le PACS, un universalisme concret à la française

Près de deux ans après le vote solennel de la loi, on peut regarder avec intérêt les premiers effets du PACS. Près de 75 000 personnes sont pacsées et cette nouvelle législation semble désormais comprise et approuvée par une majorité de Français : 70 % d'entre eux y sont favorables selon un sondage de la SOFRES en 2000.

Le PACS répondait donc à un besoin réel dans notre société. À l'étranger même, le PACS a fait école. En Allemagne, le Parlement débat d'un texte qui ressemble à notre législation et, aux États-Unis, l'État du Vermont a décidé d'octroyer des droits aux couples homosexuels sur un modèle singulier, une sorte de "PACS à l'américaine". Exemple qui, après les échecs à répétition des référendums sur le mariage gay, pourrait se répandre dans d'autres États américains.

Au-delà des chiffres - révélateurs - et des exemples étrangers, le PACS a eu depuis son adoption toute une série d'effets qui n'étaient pas forcément attendus par ses détracteurs, comme par ses partisans. Le premier effet du PACS, c'est bien sûr, et avant tout, d'avoir donné des droits à des couples qui en étaient privés. Depuis, ses effets sociaux se multiplient. Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM), Air France, Mutuelle d'Électricité de France (EDF) : on ne compte plus les collectivités, les entreprises, les syndicats, les administrations qui s'adaptent et accueillent positivement les couples pacsés en leur sein. Dans la lignée du PACS, le Gouvernement a fait voter une législation antidiscriminatoire en matière de droit du travail (l'article 122-45 du Code du travail interdit désormais toute discrimination en fonction de "l'orientation sexuelle").

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Version originale de l'Ambassade de France aux Etats-Unis

Ambassade de France aux Etats-Unis - 21 juillet 2001